Les électeurs turcs affaiblissent les militaires
Traduit de Socialist Worker 2061, 28 juillet 2007
Les électeurs turcs affaiblissent les militaires
Ron Margulies à Istanbul
Le
Parti de la Justice et du Développement (AKP) a été réélu dimanche
dernier avec une large majorité lors des élections en Turquie.
C'est
une grande victoire pour le parti islamiste qui était confronté à un
effort concerté de la part de la puissante armée turque pour influencer
le résultat du scrutin.
Le score de l'AKP a augmenté sa part de 34% aux élections de 2002 à 47%.
La campagne des militaires contre le "danger" de l'islam à la fin avril a été contre-productive.
De
même pour la campagne pour exciter le chauvinisme anti-islam et
anti-kurde par la principale opposition. le Parti Républicain du Peuple
(CHP). Le CHP, qui se présente comme social-démocrate, n'a pas réussi à
augmenter son score.
La réélection de l'AKP est vu largement
comme une victoire pour la démocratie dans un pays où l'armée
intervient souvent dans les élections. Mais il représente aussi une
continuation de la politique néolibérale mise en oeuvre pendant les
cinq premières années du règne de l'AKP.
Le programme de
"réformes" fait partie d'une tentative de la Turquie de rejoindre
l'Union Européenne et la victoire de l'AKP a été accueillie avec
bienveillance par l'organisation patronale Tüsiad.
Dans son
discours de victoire, le premier ministre Tayyip Erdogan a déclaré :
“Nous continuerons les réformes économiques et démocratiques avec
détermination". Les réformes démocratiques sont soutenues par beaucoup
de turcs, tandis que les réformes économiques sont douloureuses pour la
majorité. Mais les sociaux-démocrates ne sont pas opposés aux mesures
néolibérales.
Ils ont seulement attaqué les réformes populaires sur les
droits humains en se basant sur la préservation de la
"République".
De
fait, le néolibéralisme du gouvernement n'a eu aucune opposition au
parlement tandis que ses réformes démocratiques ont dû faire face à une
opposition féroce.
La victoire de l'AKP, malgré ses réformes
économiques profondément impopulaires, est survenue à cause de la
distorsion de la politique en Turquie due aux facteurs islamique et
kurde.
L'Etat se base sur un système laïque imposé par son
fondateur Mustafa Kemal Atatürk. L'armée joue un rôle prépondérant
comme "défenseur de la laïcité" et est hostile à un mouvement islamique
qui grandit et aux kurdes.
L'image laïque de l'Etat turc ne l'a
pas empêché d'être depuis longtemps allié aux Etats-Unis, d'être membre
de l'OTAN et un soutien d'Israël. La minorité kurde ont connu des
années de persécution et leur langue a été interdite, tandis que les
mouvements de gauche ont été réprimés.
Le gouvernement AKP a été
plus concilant sur la question kurde que tous les gouvernements
précédents, ce qui en a fait une cible pour la droite et pour
l'establishment. La majorité du pays désire une fin pacifique à la
lutte entre la guerilla kurde et l'armée.
Les campagnes pour des
candidats de la gauche indépendante à Istanbul représentent l'espoir de
la construction d'un parti qui s'oppose à la fois au néolibéralisme du
gouvernement et au chauvinisme de l'opposition social-démocrate.