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L'établissement du socialisme

 

Le socialisme est une société dans laquelle toutes les affaires sociales, y compris la production et la distribution des richesses, seront organisées démocratiquement par la population tout entière. II n'y aura ni classe dirigeante ni élite administrative mais ce sera plutôt la population entière, organisée démocratiquement, qui s'occupera de planifier et d'administrer les diverses affaires qui la concerneront.

C'est pourquoi le socialisme ne peut être établi que démocratiquement, en ce sens qu'il doit répondre à la volonté de la grande majorité mais aussi en ce sens qu'il doit être établi grâce à l'action démocratique de cette majorité.

Toute tentative de la part d'une minorité pour instaurer le socialisme est vouée à l'échec parce que, sans une population qui veuille prendre en main l'organisation de la société au lieu de laisser ce soin à une élite, cette minorité serait amenée à prendre seule les décisions et donc à former une nouvelle classe dirigeante. Le fait même que seule cette minorité désirait le socialisme serait la preuve que le socialisme n'était pas encore possible. D'ailleurs, si une minorité pensait pouvoir instaurer le socialisme avant que la majorité ne le désire, cela montrerait que ses membres n'avaient pas bien compris la signification du socialisme et qu'ils n'étaient donc pas de véritables socialistes.

Si l'on examine les diverses théories de l'action minoritaire pour instaurer le «socialisme » (telles que le bolchevisme de Lénine et ses divers dérivés, stalinisme, trotskysme, maoïsme, castrisme, etc. ), on voit bien que, dans la pratique, il s'agit d'idéologies de classes qui aspirent au pouvoir dans leurs pays et dont le but est d'industrialiser des zones sous-développées grâce à une politique de capitalisme d'Etat appelé mensongèrement « socialisme». Leurs tactiques -parti d'avant-garde, insurrections violentes, écrasement des anciens dirigeants et de l'opposition- ne présentent donc aucun intérêt pour un véritable mouvement socialiste même si elles peuvent avoir un attrait superficiel pour ceux qui voudraient des changements radicaux dans la société mais n'entrevoient aucune possibilité de changement dans les mentalités indifférentes ou même conservatrices de la classe salariée. Même en admettant qu'ils arrivent à leurs fins dans un pays très industrialisé, ce qui est très peu probable, il en résulterait une forme de capitalisme d'Etat, mais certainement pas le socialisme.

Toute théorie sérieuse sur l'établissement du socialisme doit être fondée sur l'idée que celui-ci ne peut être l'oeuvre que d'une classe salariée majoritaire, organisée démocratiquement et pénétrée des idées socialistes. C'est à dire que la révolution socialiste doit être la révolution de la majorité. Voyons où cette idée nous mène.

Puisque la machine gouvernementale est à la fois le pouvoir public de coercition et le centre d'administration sociale, on doit en prendre la direction avant que le capitalisme ne puisse être aboli, d'abord pour ne pas la laisser aux mains des opposants et ensuite pour coordonner centralement le passage au socialisme. Les partisans de l'action minoritaire ne nous contrediraient pas sur ce point. Mais l'accord s'arrête là. Ils ne veulent pas, eux, d'une politique qui consiste à convaincre par la discussion non-violente une majorité à se joindre à eux dans leur lutte; en un mot, ils rejettent les méthodes démocratiques. Ils préfèrent l'action minoritaire qui consiste à troubler la société et à miner le gouvernement soutenu par la majorité pour ensuite profiter du désordre qui en résulte et s'emparer du pouvoir grâce à un soulèvement armé.

Ceux qui se rendent compte que la révolution socialiste ne peut être qu'une révolution de la majorité n'ont aucun besoin d'envisager de telles méthodes pour accéder au pouvoir (méthodes qui échoueraient presque certainement et coûteraient la vie à nombre de personnes innocentes). Une fois que les conditions dans le capitalisme, y compris les efforts de persuasion des socialistes, autrefois minoritaires, auront créé une majorité socialiste, la question sera : quelle est la méthode la plus simple pour prendre le pouvoir d'Etat ?

Dans les pays industrialisés les plus avancés, où les circonstances économiques et les pressions de la classe salariée ont obligé la classe dirigeante à accorder un certain degré de démocratie politique, la réponse est évidente. II suffira d'utiliser les institutions politiques existantes qui permettent aux députés et aux conseillers municipaux d'être élus au suffrage universel, même si ces institutions sont limitées et incomplètes du fait de la structure de classe du capitalisme.

Cela impliquera que la majorité socialiste s'organise comme un parti politique qui sera cependant tout à fait différent des partis qui existent actuellement (partis parlementaires ou partis léninistes d'avant-garde). Le parti socialiste des salariés sera absolument démocratique. II n'y aura ni leader ni groupe de leaders, et ce sera à tous ses adhérents de tracer sa politique et de décider de ses activités. Son but étant d'établir le socialisme, il devra refléter, autant que cela se peut dans le cadre du capitalisme, le système d'organisation du socialisme, c'est-à-dire l'administration démocratique et la participation populaire. Loin d'être un parti d'avant-garde cherchant à mener la classe salariée au moyen de slogans prometteurs, il ne sera qu'un instrument permettant à la majorité, devenue socialiste, de prendre le pouvoir.

Naturellement, un tel parti aura à nommer des candidats pour se présenter aux élections à tous les niveaux. Mais ceux-ci seront de simples représentants de la majorité socialiste. La situation sera exactement l'inverse de ce qui se passe actuellement dans les partis qui se font élire au Parlement. En ce moment, les leaders utilisent les militants de leur parti simplement pour se gagner les voix qui les amèneront au pouvoir, alors que les députés et conseillers socialistes ne seront que des messagers strictement mandatés par la classe salariée socialiste. Et, bien sûr, le but d'envoyer des délégués socialistes au Parlement ne sera pas de former un «gouvernement socialiste » (ce qui serait une contradiction dans les termes) mais d'abolir le capitalisme aussi simplement et aussi rapidement que possible.

Une fois qu'elle aura l'Etat en main, la majorité socialiste pourra abolir le monopole des moyens de production dont jouit la classe capitaliste en les transformant en propriété commune gérée démocratiquement par la population entière. Quant à la machine gouvernementale - en tant que force de répression - elle sera abolie grâce à la suppression de ses institutions répressives (forces armées, police, tribunaux, prisons). Cela fait, le centre d'administration sociale ne sera plus un « Etat » proprement dit mais plutôt un bureau central où l'on règle pacifiquement et démocratiquement les affaires sociales.

Le socialisme aura alors été établi.